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DIARRHÉES

Introduction

La diarrhée est définie comme l’émission trop fréquente de selles trop abondantes et de consistances anormales (très molles ou liquides). En pratique clinique, on parle de diarrhée lorsqu’il y a au moins trois selles très molles à liquides par jour. La diarrhée est dite « aiguë » lorsqu’elle est présente depuis moins de 2 semaines. Elle est « chronique » lorsqu’elle dure plus de 4 semaines.

C’est un symptôme relativement rare chez les patients atteints d’une affection à un stade avancé (sauf dans certaines pathologies spécifiques comme l’insuffisance pancréatique) mais il génère de l’inconfort. Les diarrhées peuvent entraîner une irritation rectale ou cutanée douloureuse, une incontinence fécale, une déshydratation, un déséquilibre électrolytique et une malabsorption. Leur caractère impérieux et incontrôlable peut atteindre les patients dans leur autonomie et amour-propre, altérer leur humeur et nuire à la qualité de la relation avec leurs proches.

Les étiologies d’une diarrhée sont multiples. En soins palliatifs, la diarrhée s’explique souvent par la prise de laxatifs à dose trop élevée. L’arrêt du laxatif résout généralement le problème en 24 à 48 heures.

Évaluation

L’objectif de l’évaluation est de caractériser la diarrhée, d’en évaluer la sévérité et les conséquences et d’en identifier la (les) cause(s), afin d’orienter le plan thérapeutique.

Dans l’évaluation d’une diarrhée, on s’attache à:

• distinguer la diarrhée et :

– une fausse diarrhée. Plus fréquente que la diarrhée, la fausse diarrhée survient dans un contexte de constipation. Elle résulte d’une hypersécrétion muqueuse et d’une liquéfaction de selles en amont du fécalome, et se manifeste par l’émission de selles liquides, par un besoin impérieux de déféquer et parfois par une incontinence. Elle doit être traitée comme une constipation ;

– une incontinence anale ;

– des pertes engendrées par une fistule rectale, une tumeur ou une rectite ;

• identifier la ou les causes de la diarrhée ;

• rechercher les conséquences possibles de la diarrhée : déshydratation, déséquilibre électrolytique, irritation cutanée ou anale, etc.

L’évaluation d’un diarrhée inclut :

• une anamnèse détaillée portant, entre autres, sur :

– le contexte clinique (mode d’installation, chronologie, facteurs déclenchants ou aggravants, anamnèse médicamenteuse et alimentaire, etc.) ;

– les caractéristiques des selles (fréquence, volume, aspect) ;

– la recherche de signes digestifs et/ou généraux associés (constipation, incontinence, douleur abdominale, crampes, nausées et vomissements, méléna, fièvre, soif intense, etc.) ;

– l’efficacité et la tolérance des mesures et traitements qui ont déjà été entrepris ;

• un examen clinique général et, au besoin, un toucher rectal (pour évaluer la tonicité du sphincter anal ou rechercher une stase stercorale) ;

• un examen des selles (consistance, couleur, odeur, présence de sang, glaires ou résidus alimentaires) ;

• une lecture attentive du dossier médical ;

• la réalisation éventuelle d’investigations complémentaires adaptées au contexte clinique et au projet de soins, après avoir reçu l’accord du patient (biologie sanguine, coproculture avec recherche de clostridium difficile, RX abdomen à blanc pour rechercher une stase stercorale, échographie, tomodensitométrie abdominale, etc.).

Boîte à outils

      Étiologies courantes et
traitements étiologiques d’une
   diarrhée en soins palliatifs

Démarche thérapeutique

Principes de base

• Traiter l’étiologie de la diarrhée si possible (voir tableau).

• En cas de diarrhée infectieuse (en particulier par clostridium), donner la priorité au traitement anti-infectieux et peser les avantages et inconvénients des ralentisseurs du transit.

• Revoir le traitement médicamenteux :

– arrêter temporairement les laxatifs après avoir vérifié qu’il ne s’agit pas de fausses diarrhées ;

– revoir la médication orale en cours en fonction du risque de malabsorption (p.ex. remplacer les comprimés à libération retard par des comprimés à action immédiate).

Mesures non pharmacologiques

Adapter le régime alimentaire

• Proposer une diète riche en liquides.

• Privilégier les sucres lents : riz, biscottes, pâtes, bananes, etc. Éviter les  laitages, épices, café, alcool, graisses.

• Fractionner les repas.

Maintenir une bonne hydratation et corriger, si indiqué, les troubles électrolytiques

• Choisir de préférence des liquides riches en sucres et en ions par voie orale.

Protéger la peau

• Assurer des soins d’hygiène après chaque selle liquide.

• Protéger la peau de la région périnéale et fessière avec une pâte à l’oxyde de zinc.

Mesures pharmacologiques

Ralentir le transit intestinal avec le lopéramide : 1er choix car bien toléré.

– Agoniste des récepteurs mu (μ) intestinaux sans effet central.

– Peut être associé à un autre opioïde.

– Diarrhée aiguë : 4 mg après la 1ère selle puis 2 mg après chaque selle liquide (max 16 mg/jour). Diarrhée chronique : 2 à 4 mg toutes les 8 à 12 h.

– Effets indésirables : iléus paralytique.

–  A ne pas utiliser (sauf exception) dans les diarrhées infectieuses.

Envisager un opioïde par voie parentérale si la voie orale est compromise.

 

Dans la diarrhée réfractaire, envisager l’octréotide

• Réduit les sécrétions digestives et ralentit le péristaltisme.

• Egalement utile en cas d’iléostomie, fistule entéro-colique, syndrome carcinoïde, syndrome de Zollinger Ellison, infection par le VIH.

• 100 à 200 μg toutes les 8 h sc ou iv, ou 300 à 600 μg/jour sc continu (→ 1500 µg/j si carcinoïde).

Si utile, compléter le traitement avec un antisecrétoire (Racecadotril 100 mg 3 x / jour po).

Références

 

     

Littérature

Aretin MB. Obstipation and diarrhoea in palliative care – a pharmacist’s view. Memo. 2021; 14, 44-47.

Baker DE. Loperamide : a pharmacological review. Rev Gastroenterol Disord. 2007; 7 Suppl 3: S11-8.

Benson AB, Ajani JA, Catalino RB et al. Recommended guidelines for the treatment of cancer treatment-induced diarrhea. J Clin Oncol. 2004; 22 (14): 2918-2926.

Bossi P, Antonuzzo A, Cherny NI et al. Diarrhoea in adult cancer patients : ESMO Clinical Practice Guidelines. Ann Oncol. 2018; 29 (4) iv126-iv142.

Kornblau S, Benson AB, Catalino R, et al. Management of cancer treatment-related diarrhea. Issues and therapeutic strategies. J Pain Symptom Manage. 2000; 19(2): 118-129.

Sykes Nigel P. Constipation and diarrhea. In Oxford Textbook of Palliative Medicine, fifth edition. Oxford University Press. 2015; 675-685.

Twycross R, Wilcock A, Howard P. Palliative Care Formulary (PCF7). Palliative drugs 2017.

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